SHAKESPEARE, William (1564–1616) : "Lorsque, en disgrâce auprès de la…" (1609)

Lorsque, en dis­grâce auprès de la for­tune et des hommes,
je pleure tout seul sur ma des­tinée pro­scrite ;
lorsque, trou­blant le ciel sourd de mes cris stériles,
je me regarde et maud­is mon sort ;
Quand, jaloux d'un autre plus riche d'espérance,
je lui envie ses traits et les amis qui l'entourent,
me souhai­tant le tal­ent de celui-ci et la puis­sance de celui-là,
sat­is­fait le moins de ce dont je suis le plus doué ;
Si, au milieu de ces pen­sées où je vais me mépris­er moi-même,
je pense par hasard à toi ; – alors,
comme l'alouette s'envolant au lever du jour de la som­bre terre,
ma vie chante un hymne à la porte du ciel.
  Car le sou­venir de ton doux amour m'apporte une telle richesse
  que je dédaign­erais de chang­er avec les rois.

When, in dis­grace with for­tune and men's eyes,
I all alone beweep my out­cast state
And trou­ble deaf heav­en with my boot­less cries
And look upon myself and curse my fate,
Wish­ing me like to one more rich in hope,
Fea­tured like him, like him with friends possess'd,
Desir­ing this man's art and that man's scope,
With what I most enjoy con­tent­ed least;
Yet in these thoughts myself almost despis­ing,
Hap­ly I think on thee, and then my state,
Like to the lark at break of day aris­ing
From sullen earth, sings hymns at heaven's gate;
  For thy sweet love remember'd such wealth brings
  That then I scorn to change my state with kings.

Paru dans…
Son­nets (1609)

Infos qual­ité…
Statut : validé | mode d’édition : partage, édi­tion et icono­gra­phie | source : lieder.net | tra­duc­teur : François-Vic­tor Hugo (1828–1873) | con­tribu­teur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : © New-York Times.

REGNIER, Mathurin (1573–1613) : "J’ai vescu sans nul pensement…" (s.d.)

J’ai ves­cu sans nul pense­ment,
Me lais­sant aller douce­ment
A la bonne loy naturelle,
Et si m’estonne fort pourquoi
La mort osa songer à moi
Qui ne songeay jamais à elle.

Infos qual­ité…
Statut : validé | mode d’édition : partage, édi­tion et icono­gra­phie | source : [GALLICA.BNF.FR] REGNIER M., Œuvres com­plètes précédées de L’histoire de la satire en France par Mon­sieur Vio­l­let-le-Duc (Paris, Jan­net, 1853).  | con­tribu­teur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : Tombe d'Emery © Amaroth.

RONSARD, Pierre de – (1524–1585) : "Bonjour mon cœur…" (ca. 1564)

Bon­jour mon cœur, bon­jour ma douce vie
Bon­jour mon œil, bon­jour ma chère amie !
Hé ! Bon­jour ma toute belle,
Ma mignardise, bon­jour
Mes délices, mon amour,
Mon doux print­emps, ma douce fleur nou­velle,
Mon doux plaisir, ma douce colombelle,
Mon passereau, ma gente tourterelle !
Bon­jour ma douce rebelle.

Hé, fau­dra-t-il que quelqu’un me reproche,
Que j’ai vers toi le cœur plus dur que roche,
De t’avoir lais­sée, maîtresse,
Pour aller suiv­re le Roi,
Men­di­ant je ne sais quoi,
Que le vul­gaire appelle une largesse ?
Plutôt périsse hon­neur, court et richesse,
Que pour les biens jamais je te relaisse,
Ma douce et belle déesse.

Extrait de…
Les amours (1584)

Et dans wallonica.org…

Infos qual­ité…
Statut : validé | mode d’édition : partage, édi­tion et icono­gra­phie | source : recueil Les amours (1584)  | con­tribu­teur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : © DP.