OLIVER, Mary (1935–2019) : "Conséquences" (1986, trad. Patrick Thonart, 2023)

Par après,
J’ai sen­ti sous mon épaule gauche
la plus curieuse des blessures.
Comme si je m’étais appuyée
sur un objet vibrant trop fort,
elle saig­nait secrète­ment.
Per­son­ne ne con­naît son nom.

Par après,
par droi­ture plutôt que par rai­son,
j’ai repen­sé à ce gros Alle­mand
dans son pardessus mal ajusté,
dans les bois, près de Vienne, réal­isant
que les oiseaux s’éloignaient encore et encore, et
que même en marchant plus vite
il ne les rat­trap­erait jamais.

Com­ment vivons-nous cha­cun dans ce monde ?
Chaque chose en com­pense une autre, je sup­pose.
Quelque­fois un mal­heur ne fait pas de tort du tout,
mais au con­traire

brille comme la lune nou­velle.

Je pense sou­vent à Beethoven
se lev­ant, quand il ne pou­vait dormir,
trébuchant dans la pous­sière et les par­ti­tions frois­sées,
bail­lant, s’asseyant au piano,
traçant rapi­de­ment note après note après note.

Consequences

After­ward,
I found under my left shoul­der
the most curi­ous wound.
As though I had leaned against
some whirring thing,
it bleeds secret­ly.
Nobody knows its name.

After­ward,
for a rea­son more right than ratio­nal,
I thought of that fat Ger­man
in his ill-fit­ting over­coat
in the woods near Vien­na, real­iz­ing
that the birds were going far­ther and far­ther away, and
no mat­ter how fast he walked
he couldn’t keep up.

How does any of us live in this world?
One thing com­pen­sates for anoth­er, I sup­pose.
Some­times what’s wrong does not hurt at all, but rather
shines like a new moon.

I often think of Beethoven
ris­ing, when he couldn’t sleep,
stum­bling through the dust and crum­pled papers,
yawn­ing, set­tling at the piano,
ink­ing in rapid­ly note after note after note.

Paru dans…
Dream Work (1986)

Affich­er le recueil dans la poet­i­ca…
Une Ourse dans le jardin (2023)

Infos qual­ité…
Statut : validé | mode d’édition : tra­duc­tion, édi­tion et icono­gra­phie | source : Dream Work (1986) | tra­duc­teur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : © Béné­dicte Wesel.