DONNE, John (1572–1631) : "Nul homme n’est une île…" (1623)

Nul homme n’est une île, com­plète en elle-même ; chaque homme
est un morceau du con­ti­nent, une part de l’ensemble ;
si un bout de terre est emporté par la mer, l’Europe
en est amoin­drie, comme si un promon­toire l’était, comme si
le manoir de tes amis ou le tien
l’était. La mort de chaque homme me dimin­ue,
car je suis impliqué dans l’humanité.
N’envoie donc jamais deman­der pour qui
la cloche sonne : elle sonne pour toi.

No man is an island entire of itself; every man
is a piece of the con­ti­nent, a part of the main;
if a clod be washed away by the sea, Europe
is the less, as well as if a promon­to­ry were, as
well as any man­ner of thy friends or of thine
own were; any man's death dimin­ish­es me,
because I am involved in mankind.
And there­fore nev­er send to know for whom
the bell tolls; it tolls for thee.

[Old Eng­lish Ver­sion]
No man is an Iland, intire of itselfe; every man
is a peece of the Con­ti­nent, a part of the maine;
if a Clod bee washed away by the Sea, Europe
is the lesse, as well as if a Promon­to­rie were, as
well as if a Manor of thy friends or of thine
owne were; any mans death dimin­ish­es me,
because I am involved in Mankinde;
And there­fore nev­er send to know for whom
the bell tolls; It tolls for thee.

Paru dans…
Med­i­ta­tions upon Emer­gent Occa­sions, Med­i­ta­tion XVII (1623)

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Statut : validé | mode d’édition : partage, édi­tion et icono­gra­phie | source : Médi­ta­tions en temps de crise (1623) | con­tribu­teur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : © The New York­er.

JUARROZ, Roberto (1925–2021) : "Comment comprendre l’espace…" (1958)

Com­ment com­pren­dre l’espace
qui me sépare de l’arbre,
si son écorce des­sine les lignes
qui man­quent à ma pen­sée.

Com­ment com­pren­dre la par­en­thèse
qui va du nuage à mes yeux,
si les fig­ures du vent
délient le temps ser­ré de ma petite his­toire ?

Com­ment com­pren­dre le cri pétri­fié
qui gèle toutes les paroles du monde,
si de même qu’il n’est qu’un seul silence
il n’est au fond qu’une seule parole ?

Je ne com­prends pas la dis­tance.
L’ultime preuve en est l’espace absurde
qui sépare en deux vies
ton exis­tence et la mienne.

Paru dans…
Poésie ver­ti­cale (1958)

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Statut : validé | mode d’édition : partage, édi­tion et icono­gra­phie | source : recueil Poésie ver­ti­cale (1958) | con­tribu­teur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : © José Cor­ti.

FOIX, J.V. (1893–1987) : "Oh puissais-je accorder la Raison, la Folie,…" (publié en 1987)

Oh puis­sais-je accorder la Rai­son, la Folie,
Qu’un clair matin, non loin de la mer claire,
Cet esprit mien, de plaisir trop avare,
Me fasse l’Éternel présent. Et par la fan­taisie

- Qui le cœur embrase et détourne l’ennui -
Que les mots, les sons, les tim­bres, quelque­fois
Per­pétuent l’aujourd’hui, et que l’ombre rare
Qui me con­tre­fait au mur, me soit sage et guide

En mon errance par­mi tamaris et dalles ;
- Oh douceurs dans la bouche ! les douces pen­sées ! -
Qu’elles fassent vrai l’Abscons, qu’à l’abri de calan­ques,

Les images du songe par les yeux éveil­lés,
Vivent ; que le Temps ne soit plus; mais l’espérance
En d’Immortels Absents, la lumière et la danse !

Paru dans…
Poésie. Prose, recueil posthume (1987)

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Statut : validé | mode d’édition : partage, édi­tion et icono­gra­phie | source : Poésie. Prose, recueil posthume (1987) | con­tribu­teur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : © reusdigital.cat.