NERUDA, Pablo (1904–1973) : "Je ne t’aime pas comme rose de sel, ni topaze…" (1959)

Je ne t’aime pas comme rose de sel, ni topaze
Ni comme flèche d’oeillets propageant le feu :
Je t’aime comme l’on aime cer­taines choses obscures,
De façon secrète, entre l’ombre et l’âme.

Je t’aime comme la plante qui ne fleu­rit pas
Et porte en soi, cachée, la lumière de ces fleurs,
Et grâce à ton amour dans mon corps vit l’arôme
Obscur et con­cen­tré mon­tant de la terre.

Je t’aime sans savoir com­ment, ni quand, ni d’où,
Je t’aime directe­ment sans prob­lèmes ni orgueil :
Je t’aime ain­si car je ne sais aimer autrement,

Si ce n’est de cette façon sans être ni toi ni moi,
Aus­si près que ta main sur ma poitrine est la mienne,
Aus­si près que tes yeux se fer­ment sur mon rêve.

Extrait de…
La cen­taine d'amour (1959)

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Statut : validé | mode d’édition : partage, édi­tion et icono­gra­phie | source : recueil La cen­taine d’Amour (1959)  | con­tribu­teur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : © La Razón.

DESNOS, Robert (1900–1945) : "A la mystérieuse" (1926)

J’ai tant rêvé de toi que tu perds ta réal­ité.
Est-il encore temps d’atteindre ce corps vivant
Et de bais­er sur cette bouche la nais­sance
De la voix qui m’est chère?

J’ai tant rêvé de toi que mes bras habitués
En étreignant ton ombre
A se crois­er sur ma poitrine ne se pli­eraient pas
Au con­tour de ton corps, peut-être.
Et que, devant l’apparence réelle de ce qui me hante
Et me gou­verne depuis des jours et des années,
Je deviendrais une ombre sans doute.
O bal­ances sen­ti­men­tales.

J’ai tant rêvé de toi qu’il n’est plus temps
Sans doute que je m’éveille.
Je dors debout, le corps exposé
A toutes les apparences de la vie
Et de l’amour et toi, la seule
qui compte aujourd’hui pour moi,
Je pour­rais moins touch­er ton front
Et tes lèvres que les pre­mières lèvres
et le pre­mier front venu.

J’ai tant rêvé de toi, tant marché, par­lé,
Couché avec ton fan­tôme
Qu’il ne me reste plus peut-être,
Et pour­tant, qu’a être fan­tôme
Par­mi les fan­tômes et plus ombre
Cent fois que l’ombre qui se promène
Et se promèn­era allè­gre­ment
Sur le cad­ran solaire de ta vie.

Extrait de…
​poème de 1926, paru dans Corps et biens (1930)

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Statut : validé | mode d’édition : partage, édi­tion et icono­gra­phie | source : recueil Le fou d’Elsa (1963)  | con­tribu­teur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : Elsa et Louis © radiofrance.fr/franceculture.

HUGO, Victor (1802–1885) : "Demain, dès l’aube…" (1856)

Demain, dès l’aube, à l’heure où blan­chit la cam­pagne,
Je par­ti­rai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.
J’irai par la forêt, j’irai par la mon­tagne.
Je ne puis demeur­er loin de toi plus longtemps.

Je marcherai les yeux fixés sur mes pen­sées,
Sans rien voir au dehors, sans enten­dre aucun bruit,
Seul, incon­nu, le dos cour­bé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.

Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descen­dant vers Harfleur,
Et quand j’arriverai, je met­trai sur ta tombe
Un bou­quet de houx vert et de bruyère en fleur.

Extrait de…
Les con­tem­pla­tions (1856)

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Statut : validé | mode d’édition : partage, édi­tion et icono­gra­phie | source : recueil Les con­tem­pla­tions (1856)  | con­tribu­teur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : © Lee / Leemage.

THONART, Patrick (né en 1961) : "Tu es ma rive" (2019)

THONART, Patrick (né en 1961) : "Tous deux se regardaient…" (2019)

THONART, Patrick (né en 1961) : "Tu es là, vivante à mon cœur comme l’épousée" (2019)

Je ne met­trai pas genou en terre,
Que seul ou… devant toi.
Je ne pleur­erai pas l’amertume de mes entrailles,
Que seul ou… devant toi.
Je ne lèverai pas le poing au ciel
pour maudire le des­tin,
Que seul ou… devant toi.

Ils ne sauront rien de mon trou­ble,
Ils ne com­pren­dront pas pourquoi je par­le seul,
Pourquoi j’offre l’échine, moi qui ne fuyais pas le regard.

Mais tous soupireront d’aise
Quand je souri­rai,
Devant toi,
Enfin trou­vée…

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non pub­lié (2014)

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Statut : validé | mode d’édition : rédac­tion, édi­tion et icono­gra­phie | auteur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : DOTREMONT, Chris­t­ian : L’ours du sens (ca. 1976) © MRBAB.

THONART, Patrick (né en 1961) : "Hier est loin" (2019)

Hier est loin,
C’est déjà demain.

Un jour, la Terre
A inven­té l’Amour
En embras­sant le Feu.
Son ven­tre mouil­lé d’Eau,
Elle l’a con­fié au Ciel
Pour qu’il forge chaque jour,
Le matin de nous deux,
L’eau mar­iée de nos yeux,
Le feu sauvage de nos ven­tres,
La terre con­fi­ante sous nos pas
Et le vent qui nous porte.

Je t’aime à jamais…
Plus un jour

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non pub­lié (2014)

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Statut : validé | mode d’édition : rédac­tion, édi­tion et icono­gra­phie | auteur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : André Mas­son, Terre éro­tique (1955) © leshardis.com.

DESBORDES-VALMORE, Marceline (1786–1859) : "Les séparés" (posth. 1860)

N’écris pas, je suis triste et je voudrais m’éteindre.
Les beaux étés, sans toi, c’est l’amour sans flam­beau.
J’ai refer­mé mes bras qui ne peu­vent t’atteindre
Et frap­per à mon cœur, c’est frap­per au tombeau.

N’écris pas, n’apprenons qu’à mourir à nous-mêmes.
Ne demande qu’à Dieu, qu’à toi si je t’aimais.
Au fond de ton silence, écouter que tu m’aimes,
C’est enten­dre le ciel sans y mon­ter jamais.

N’écris pas, je te crains, j’ai peur de ma mémoire.
Elle a gardé ta voix qui m’appelle sou­vent.
Ne mon­tre pas l’eau vive à qui ne peut la boire.
Une chère écri­t­ure est un por­trait vivant.

N’écris pas ces deux mots que je n’ose plus lire.
Il sem­ble que ta voix les répand sur mon cœur,
Que je les vois briller à tra­vers ton sourire.
Il sem­ble qu’un bais­er les empreint sur mon cœur.

N’écris pas, n’apprenons qu’à mourir à nous-mêmes.
Ne demande qu’à Dieu, qu’à toi si je t’aimais.
Au fond de ton silence, écouter que tu m’aimes,
C’est enten­dre le ciel sans y mon­ter jamais.

N’écris pas !

Extrait de…
Poésies inédites (posthume, 1860)

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Statut : validé | mode d’édition : partage, édi­tion et icono­gra­phie | source : recueil Poésies inédites (posthume, 1860) | con­tribu­teur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : © Douai, Musée de la Char­treuse. Pho­tographe : Daniel Lefeb­vre.

RICHEPIN, Jean (1849–1926) : "Première gelée" (1881)

Voici venir l’Hiver, tueur des pau­vres gens.

Ain­si qu’un dur baron précédé de ser­gents,
Il fait, pour l’annoncer, courir le long des rues
La gelée aux doigts blancs et les bis­es bour­rues.
On entend haleter le souf­fle des gamins
Qui se sauvent, col­lant leurs lèvres à leurs mains,
Et tapent forte­ment du pied la terre sèche.
Le chien, sans rien flair­er, file ain­si qu’une flèche.
Les messieurs en cha­peau, raides et bou­ton­nés,
Font le dos rond, et dans leur col plon­gent leur nez.
Les femmes, comme des coureurs dans la car­rière,
Ont la gorge en avant, les coudes en arrière,
Les reins cam­brés. Leur pas, d’un mou­ve­ment coquin,
Fait ond­uler sur leur croupe leur trousse­quin.

Oh ! comme c’est joli, la pre­mière gelée !
La vit­re, par le froid du dehors fla­gel­lée,
Étin­celle, au dedans, de cristaux déli­cats,
Et papil­lote sous la nacre des micas
Dont le dessin fleu­rit en volutes d’acanthe.
Les arbres sont vêtus d’une faille craquante.
Le ciel a la pâleur fine des vieux argents.

Voici venir l’Hiver, tueur des pau­vres gens.

Voici venir l’Hiver dans son man­teau de glace.
Place au Roi qui s’avance en gron­dant, place, place !
Et la bise, à grands coups de fou­et sur les mol­lets,
Fait courir le gamin. Le vent dans les col­lets
Des messieurs bou­ton­nés fourre des cents d’épingles.
Les chiens au bout du dos sem­blent traîn­er des tringles.
Et les femmes, sen­tant des petits doigts fripons
Grimper sournoise­ment sous leurs derniers jupons,
Se cog­nent les genoux pour mieux ser­rer les cuiss­es.
Les maisons dans le ciel fument comme des Suiss­es.
Près des chenets joyeux les messieurs en cha­peau
Vont s’asseoir ; la chaleur leur déten­dra la peau.
Les femmes, rel­e­vant leurs jupes à mi-jambe,
Pour garan­tir leur teint de la bûche qui flambe
Éten­dront leurs deux mains longues aux doigts rosés,
Qu’un ten­dre amant fera mol­lir sous les bais­ers.
Heureux ceux-là qu’attend la bonne cham­bre chaude !
Mais le gamin qui court, mais le vieux chien qui rôde,
Mais les gueux, les petits, le tas des indi­gents…

Voici venir l’Hiver, tueur des pau­vres gens.

Extrait de…
La Chan­son des gueux (1881)

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Statut : validé | mode d’édition : partage, édi­tion et icono­gra­phie | source : recueil La Chan­son des Gueux, Les qua­tre saisons, XIV (1881)  | con­tribu­teur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : © Le Devoir.

REGNIER, Mathurin (1573–1613) : "J’ai vescu sans nul pensement…" (s.d.)

J’ai ves­cu sans nul pense­ment,
Me lais­sant aller douce­ment
A la bonne loy naturelle,
Et si m’estonne fort pourquoi
La mort osa songer à moi
Qui ne songeay jamais à elle.

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Statut : validé | mode d’édition : partage, édi­tion et icono­gra­phie | source : [GALLICA.BNF.FR] REGNIER M., Œuvres com­plètes précédées de L’histoire de la satire en France par Mon­sieur Vio­l­let-le-Duc (Paris, Jan­net, 1853).  | con­tribu­teur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : Tombe d'Emery © Amaroth.

Devotions: The Selected Poems of Mary Oliver (recueil, 2017)

[PENGUINRANDOMHOUSE.COM] Ce recueil est un Best-Sell­er du New York Times et a été désigné “Livre qui m’a aidé.e à tenir bon” par le Oprah’s Book Club.

« Quel que soit l’endroit où vous com­mencez à lire, Devo­tions est incroy­able­ment atti­rant, qu’il s’agisse des exubérants poèmes au chien d’Oliver ou des poèmes sélec­tion­nés dans Amer­i­can Prim­i­tive (prix Pulitzer) et dans Dream Work, un de ses recueils les plus excep­tion­nels. Peut-être que le plus impor­tant, c’est cette écri­t­ure lumineuse qui nous apaise face à un monde fou et qui démon­tre com­bi­en une con­science plus aigüe peut pro­fil­er et trans­former une vie, instant après instant, poème après poème. » —The Wash­ing­ton Post

C’est un peu comme si la poétesse s’était assise à côté de nous et nous indi­quait quels poèmes elle con­sid­ère comme les plus impor­tants.” — Chica­go Tri­bune

La poétesse Mary Oliv­er a reçu le prix Pulitzer et elle présente ici une sélec­tion per­son­nelle de son tra­vail, ce qui en fait prob­a­ble­ment le recueil défini­tif de ses poèmes, écrits pen­dant plus de cinq décen­nies de sa mag­nifique car­rière lit­téraire.

A tra­vers les années, Mary Oliv­er a su touch­er un nom­bre impres­sion­nant de lecteurs avec des vers bril­la­ment ciselés, exp­ri­mant son amour pour le monde naturel et les liens puis­sants qui  unis­sent tous les vivants. Iden­ti­fiée par Dwight Gar­ner comme « de loin la poétesse la plus ven­due du pays », elle nous revient avec ce recueil éton­nant et défini­tif de ses poèmes des cinquante dernières années.

Edités avec soin, ce sont plus de 200 poèmes par­mi les meilleurs qu’Oliver a écrits, depuis son tout pre­mier recueil, No Voy­age and Oth­er Poems, pub­lié en 1963 (elle avait 28 ans), jusqu’à son tout dernier recueil, Felic­i­ty, paru en 2015. Cet ouvrage est fait pour dur­er et il a été conçu par Mary Oliv­er en per­son­ne : elle y offre le meilleur d’elle-même. Dans ces pages, elle nous pro­pose un recueil extra­or­di­naire, ines­timable, de ses obser­va­tions à la fois déli­cates, pas­sion­nées et pré­cis­es de la Nature authen­tique.

(trad. Patrick Thonart)

OLIVER Mary, Devo­tions: The Select­ed Poems of Mary Oliv­er (Pen­guin Press, 2017)
480 pages – ISBN‎ 0399563245 – Eng­lish

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Mary OLIVER dans la poet­i­ca

FOIX, J.V. (1893–1987) : "Oh puissais-je accorder la Raison, la Folie,…" (publié en 1987)

Oh puis­sais-je accorder la Rai­son, la Folie,
Qu’un clair matin, non loin de la mer claire,
Cet esprit mien, de plaisir trop avare,
Me fasse l’Éternel présent. Et par la fan­taisie

- Qui le cœur embrase et détourne l’ennui -
Que les mots, les sons, les tim­bres, quelque­fois
Per­pétuent l’aujourd’hui, et que l’ombre rare
Qui me con­tre­fait au mur, me soit sage et guide

En mon errance par­mi tamaris et dalles ;
- Oh douceurs dans la bouche ! les douces pen­sées ! -
Qu’elles fassent vrai l’Abscons, qu’à l’abri de calan­ques,

Les images du songe par les yeux éveil­lés,
Vivent ; que le Temps ne soit plus; mais l’espérance
En d’Immortels Absents, la lumière et la danse !

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Poésie. Prose, recueil posthume (1987)

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Statut : validé | mode d’édition : partage, édi­tion et icono­gra­phie | source : Poésie. Prose, recueil posthume (1987) | con­tribu­teur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : © reusdigital.cat.

APOLLINAIRE, Guillaume (1880–1918) : "Mon ptit Lou adoré…" (1915)

Mon ptit Lou adoré
Je voudrais mourir un jour que tu m’aimes
Je voudrais être beau pour que tu m’aimes
Je voudrais être fort pour que tu m’aimes
Je voudrais être jeune jeune pour que tu m’aimes
Je voudrais que la guerre recom­mençât pour que tu m’aimes
Je voudrais te pren­dre pour que tu m’aimes
Je voudrais te fess­er pour que tu m’aimes
Je voudrais te faire mal pour que tu m’aimes
Je voudrais que nous soyons seuls dans une cham­bre d’hôtel à Grasse pour que tu m’aimes
Je voudrais que nous soyons seuls dans mon petit bureau près de la ter­rasse couchés sur le lit de fumerie pour que tu m’aimes
Je voudrais que tu sois ma sœur pour t’aimer inces­tueuse­ment
Je voudrais que tu euss­es été ma cou­sine pour qu’on se soit aimés très jeunes
Je voudrais que tu sois mon cheval pour te chevauch­er longtemps longtemps

Je voudrais que tu sois mon cœur pour te sen­tir tou­jours en moi
Je voudrais que tu sois le par­adis ou l’enfer selon le lieu où j’aille
Je voudrais que tu sois un petit garçon pour être ton pré­cep­teur
Je voudrais que tu sois la nuit pour nous aimer dans les ténèbres
Je voudrais que tu sois ma vie pour être par toi seule
Je voudrais que tu sois un obus boche pour me tuer d’un soudain amour.

Extrait de…
Poèmes à Lou (1947)

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Statut : validé | mode d’édition : partage, édi­tion et icono­gra­phie | source : recueil Poèmes à Lou (1947)  | con­tribu­teur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : Guil­laume Apol­li­naire et sa femme Jacque­line Kolb en 1918 sur la ter­rasse de leur apparte­ment du 202 boule­vard Saint-Ger­main © Bib­lio­thèque his­torique de la Ville de Paris

RONSARD, Pierre de – (1524–1585) : "Bonjour mon cœur…" (ca. 1564)

Bon­jour mon cœur, bon­jour ma douce vie
Bon­jour mon œil, bon­jour ma chère amie !
Hé ! Bon­jour ma toute belle,
Ma mignardise, bon­jour
Mes délices, mon amour,
Mon doux print­emps, ma douce fleur nou­velle,
Mon doux plaisir, ma douce colombelle,
Mon passereau, ma gente tourterelle !
Bon­jour ma douce rebelle.

Hé, fau­dra-t-il que quelqu’un me reproche,
Que j’ai vers toi le cœur plus dur que roche,
De t’avoir lais­sée, maîtresse,
Pour aller suiv­re le Roi,
Men­di­ant je ne sais quoi,
Que le vul­gaire appelle une largesse ?
Plutôt périsse hon­neur, court et richesse,
Que pour les biens jamais je te relaisse,
Ma douce et belle déesse.

Extrait de…
Les amours (1584)

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Statut : validé | mode d’édition : partage, édi­tion et icono­gra­phie | source : recueil Les amours (1584)  | con­tribu­teur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : © DP.

REVERDY, Pierre (1889–1960) : "Tard dans la vie" (1960)

Je suis dur
Je suis ten­dre
Et j’ai per­du mon temps
A rêver sans dormir
A dormir en marchant
Partout où j’ai passé
J’ai trou­vé mon absence
Je ne suis nulle part
Excep­té le néant
Mais je porte caché au plus haut des entrailles
A la place où la foudre a frap­pé trop sou­vent
Un cœur où chaque mot a lais­sé son entaille
Et d’où ma vie s’égoutte au moin­dre mou­ve­ment

Extrait de…
La lib­erté des mers (​1960)

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THONART, Patrick (né en 1961) : "Tu as jeté sur moi…" (2014)

Tu as jeté sur moi
Le voile de la Tristesse.
Mais quand, face au soleil,
Tu souris de nous deux,
Entre les mailles dis­jointes,
Je vois briller tes yeux.

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non pub­lié (2014)

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Statut : validé | mode d’édition : rédac­tion, édi­tion et icono­gra­phie | auteur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : Maya Deren © Alexan­der Hack­en­schmied.

THONART, Patrick (né en 1961) : "L’Ours titube dans la Forêt…" (2014)

L’Ours titube dans la Forêt
Il a les yeux brûlés
Il marche dos à la clair­ière
Où il l’a vue pass­er

Poil momi­fié et ven­tre sec
Elle s’agitait ivre et malade
De ces baies noires
Trop fer­men­tées

Le cœur à sang il a hurlé
Gueule au zénith il a pleuré
Et chaque larme était une loupe
Que le Soleil a transper­cée

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non pub­lié (2014)

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THONART, Patrick (né en 1961) : "L’Ours lève la truffe…" (2014)

L’ours lève la truffe
Au vent du matin inqui­et

Il sort la langue
Aux odeurs du print­emps trompeur

L’hiver a fon­du comme sa douleur passée
Et la riv­ière gon­fle des neiges liq­uides
Comme son corps aujourd’hui pal­pite
Des sangs nou­veaux et de l’appel d’amour

Ce matin la renarde a frôlé
De sa gorge dard­ée d’aubépine
Son dru pelage tout encore embrumé
Pour que son cœur retrou­ve racine

Pour­tant…

Pour­tant l’ours hume le vide
Dans sa cav­erne, les murs sont éraflés
De ses pattes trop lour­des – lour­des
De son ven­tre qu’il ne peut laiss­er chanter

Pour­tant l’ours craint le vide
Dans sa clair­ière, les pier­res sont dénudées
Du soleil gris qui les a raclées
Du regard vide des isolés

Pour­tant l’ours com­bat le vide
Dans sa forêt, les troncs l’attendent
Et leurs fûts droits mon­trent le sens
De la vie droite vers quoi ils ten­dent

Mais…

Le print­emps a men­ti :
Il n’était pas tout l’été

Alors, mon Amour,
Je mar­que le pas
Et j’attends le tien
Pour m’apaiser dans ton sein

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non pub­lié (2014)

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Statut : validé | mode d’édition : rédac­tion, édi­tion et icono­gra­phie | auteur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : © Qui avance de print­emps en tout temps vif (1982) © Chris­t­ian Dotremont – Karel Appel – MRBAB.

THONART, Patrick (né en 1961) : "Le matin du Bon Jour…" (2014)

Le matin du Bon Jour
Il n’y aura plus rien
Rien que l’ours au soleil
Sur le dos
Et elle
En ten­dre char­rue
Qui creuse le creux de son flanc

Il y aura le pain chaud des peaux cuites
La can­nelle au nez
et
Le miel au ven­tre

Le matin du Bon Jour
Seuls les oiseaux
Racon­teront le monde

Le matin du Bon Jour
C’est le lent demain du Soir
Où elle posera sa valise
En souri­ant

Paru sur…
non pub­lié (2014)

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Statut : validé | mode d’édition : rédac­tion, édi­tion et icono­gra­phie | auteur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : © Pierre Alechin­sky, Soleil (1950).

THONART, Patrick (né en 1961) : "Pleurs" (2014)

De tout ce qui me sera demain
Je ne demande qu’un sein
A ma joue for­mé
Et de mes larmes baigné

Et je… l’enfant… y pleur­erai
Et la femme qui le porte
Je pour­rai enfin
Comme un homme
L’aimer

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non pub­lié (2014)

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Statut : validé | mode d’édition : rédac­tion, édi­tion et icono­gra­phie | auteur : Patrick Thonart | crédits illus­tra­tions : DOTREMONT, Chris­t­ian : Ques­tion insidi­aire (1978) © MRBAB.

THONART, Patrick (né en 1961) : "L’œil de l’Homme est dans le lac…" (2014)